Alors que le projet de parc éolien de Ste-Croix empiète dans des zones de première importance pour des oiseaux nicheurs menacés, la Cour de droit administratif et public du canton de Vaud CDAP n’a pas jugé utile de statuer sur ces points sensibles du projet. D’autre part, des lacunes dans le dossier, comme l’absence de préavis de l’Office Fédéral de l’Environnement OFEV, ont conduit BirdLife Suisse et Helvetia Nostra à soumettre le cas au Tribunal fédéral.
BirdLife Suisse et Helvetia Nostra ont analysé le jugement rendu par la CDAP. Celle-ci a certes demandé des mesures de réduction de la mortalité des oiseaux migrateurs mais ne s’est pas prononcée sur les impacts causés par le projet sur l’avifaune nicheuse. Plusieurs espèces menacées d’oiseaux nicheurs fréquentent pourtant la zone qui serait occupée par trois des machines, dans le secteur de La Gittaz. Plusieurs lacunes dans la procédure n’ont pas été non plus relevées par la CDAP comme l’absence de préavis de l’OFEV concernant le défrichement. « Pourtant, ce préavis est obligatoire pour des défrichements dépassant 5'000 m2. Il est de surcroît lié à l’évaluation des impacts du projet sur la biodiversité et notamment les espèces menacées » souligne Anne Bachmann, chargée d’affaires à Helvetia Nostra.
Comme l’a relevé le Tribunal fédéral dans son jugement du projet de parc du Schwyberg (FR), il est important que les cantons recherchent des alternatives pour supprimer ou réduire les atteintes. « Le fait que des machines soient situées dans un site reconnu de grande importance par la Confédération et le canton de Vaud pour des espèces menacées, considérées de surcroît vulnérables aux impacts éoliens, doit faire l’objet de l’appréciation des juges fédéraux » estime François Turrian, directeur romand de BirdLife Suisse.
Mesures de compensations insuffisantes ou inadaptées
Des mesures de compensation ont été proposées par le canton. La plus pertinente, qui consistait à réduire les dérangements en élargissant la fermeture de la route du col de l’Aiguillon à la période de reproduction des oiseaux menacés, a tout bonnement été refusée par la commune de Baulmes. Pour la bécasse des bois, aucune mesure de compensation effective n’est considérée comme valide actuellement. Il s’agit par conséquent d’éviter d’implanter des turbines trop proches des sites occupés. Enfin, pour le Grand-duc d’Europe, il aurait fallu proposer un enfouissement de tronçons de ligne à moyenne tension au lieu ou en plus de l’isolation de pylônes, mesure déjà prévue par la législation.
D’autres lacunes ont encore été relevées par les associations, notamment en lien avec les impacts paysagers. Il est important de relever que le parc éolien serait clairement visible depuis le site emblématique du Chasseron.
Grand tétras, un avenir incertainLe grand tétras, se fait de plus en plus rare en Suisse. Alors que les forêts helvétiques en comptaient plus de 1’100 il y a 40 ans, leur population est aujourd’hui estimée à 360-470 mâles (nouvel Atlas des oiseaux nicheurs de Suisse édité par la Station ornithologique suisse). Le statut de l’oiseau est « En danger » sur la Liste rouge. Ce déclin s'explique principalement par les modifications de son habitat ainsi que les dérangements humains. Les parcs éoliens constituent une menace identifiée lorsqu’ils sont situés dans les zones encore occupées ou aux abords de celles-ci. Des études ont montré la grande sensibilité de cette famille d’oiseaux aux éoliennes. Celles-ci génèrent des pertes d’habitats, des dérangements et provoquent le morcellement des territoires. Des collisions avec les mâts ou les pales ne sont pas exclues. L’arc jurassien a une importance majeure pour la préservation de l’espèce en Suisse. Dans le canton de Vaud, outre Ste-Croix, les projets de EolJoux, Grandsonnaz et Mollendruz portent atteinte à des habitats de première priorité du grand tétras. La conception énergie éolienne signale clairement que des parcs éoliens ne devraient pas être réalisés dans les derniers habitats de cet oiseau. |
Renseignements
- BirdLife Suisse, François Turrian, directeur romand, tél. 079 318 77 75
- Helvetia Nostra, Anne Bachmann, chargée d’affaires, tél. 021 964 24 24
Images
Trois éoliennes du projet de Ste-Croix sont situées dans un secteur encore naturel, en bordure d’un Territoire d’Intérêt Biologique Prioritaire et de corridors de faune abritant des espèces rares. Photo: BirdLife Suisse L'image ne peut être utilisée que dans le cadre de ce communiqué et avec mention exacte de l'auteur. |
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Le grand tétras est strictement protégé. Cet oiseau devenu l’un des plus rares de Suisse est mis sous pression par des projets éoliens qui empiètent sur ces derniers habitats jurassiens. Photo: Michael Gerber L'image ne peut être utilisée que dans le cadre de ce communiqué et avec mention exacte de l'auteur. |